Map with a view – 2014

Géométrie de l’enfermement

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www.lauretixier.com/mapwithaview/

Aquarelles noires sur papier vélin,  watercolor on paper / (33x) 30 x 30  cm
Peintures murales, wall paintings / Dimensions variables, dimensions variable / (33x)
-Prison de la Santé, Paris, France / Maquette (tissu et rembourrage), maquette (fabric and stuffing) / 20 x 225 x 150 cm
-Chi Hoa Prison, Ho Chi Minh City, Vietnam / Plan (tissu et rembourrage)map (fabric and stuffing) / 200 x 140 cm
-Pelican Bay State Prison, California, USA / Drap, broderie française, passé plat droit sur point de chaînette, Bed sheet, french embroidery / Brodeuse, embroiderer : Manon Martin-Delaunay / 250 x 115 cm
Installation vidéo, 2’10 (boucle), video installation, 2’10 (loop) / Edition de 5 exemplaires, limited édition of 5 sets
Coffret de 33 sérigraphies sur papier velin BFK Rives, box of 33 silkscreen printings / Édition de 33 exemplaires numérotés et signés, edition of 33 numbered and signed / 40 x 40 x 3 cm

Map with a view  est au départ une série d’aquarelles noires aux motifs abstraits dont on ne tarde pas à découvrir qu’il s’agit d’une collection de plans de prisons. Cet inventaire des géométries de l’enfermement, des espaces de l’orthopédie sociale dont parlait Michel Foucault, est composé d’une trentaine de prisons d’origines géographiques et historiques diverses. Certaines ont disparu ( la prison pour enfants de la Petite Roquette à Paris est devenue un square, celle de Millbank à Londres a fait place à la Tate Britain…), d’autres ont été réaffectées (en mémoriaux et prison-musée comme Robben Island en Afrique du Sud et Indian Cellular Jail en Indes, en musées comme le Panoptico à Bogota devenu le Musée National de Colombie, en universités comme celle de Saint-Paul et Saint-Jean à Lyon, en hôtels de luxe…), les autres sont toujours en fonction.
Quelques années après avoir travaillé à partir des prisons imaginaires de Piranèse (Dolci Carceri), Laure Tixier revient sur l’architecture carcérale. Découvrant pour se repérer lors d’un déplacement dans le quatorzième arrondissement, une zone floutée correspondant à la prison de la Santé sur le plan Paris dans Google Earth, elle a voulu redonner « vue » et « corps » à ce trou noir au milieu de la ville. Cette tentative de réparation, de raccommodage du tissu urbain s’incarne dans une sculpture transitionnelle posée au sol. La technique de ce «tapis quartier» est un mélange de patchwork et de palimpseste. Réalisé avec du rembourrage et des tissus de différentes origines (faisant référence au classement par ethnie des blocs de la prison), il matérialise cette zone opaque et hermétique : une inversion par rapport au plan de Google la fait surgir du plan de manière débordante et boursoufflée.
Commence alors une expédition sur Google Earth, de ville en ville, de pays en pays, en quête de prisons : floutées ou non (peu le sont finalement), leur géométrie est repérable qu’elles soient ruptures au sein des villes, clairières au milieu de la forêt, oasis en plein désert, ou îles.
À partir de la recherche géographique se tisse le fil historique. La géométrie de l’enferment a voyagé : ramenée de Russie par Jeremy Bentham, elle a germé à Londres, fleuri en Amérique avant d’être ramenée en France par Alexis de Tocqueville, l’Europe l’a implantée et multipliée dans ses colonies en Asie et en Afrique où elle était inconnue et aujourd’hui surpeuplée.
Issus de cet inventaire, deux wall drawings à l’encre noir contrastent, par leur pureté et leur dureté, avec la chatoyance des maquettes et plans en tissu. Dans cette tension entre le géométrique et l’organique, se joue le refoulé de la rationalisation, le débordement des corps que ces espaces de redressement et d’enfermement tentent de contraindre voire de dissoudre. Au mur, le tapis d’un quartier d’Ho Chi Minh Ville, avec en son centre la prison de Chi Hoa construite par les français pendant la période coloniale et toujours en fonction. Un drap, porteur d’intimité et instrument d’évasion, est brodé du titre de l’exposition et du plan de la prison d’Etat de Pelican Bay en Californie, installation de type Supermax où le détenu est en isolement total du reste du monde, même carcéral.
At first sight, Map with a view is a series of black abstract watercolours. Then one realizes that it is a collection of plans of prisons from all over the world. This inventory of confinement geometries, of « social orthopaedics » spaces  as Michel Foucault would call them, is made of around thirty prisons from different geographical and historical origins. Some of them no longer exist (the children’s prison la Petite Roquette in Paris which is now a park; Millbank prison in London has become the Tate Britain…); others have been reassigned (memorials and prison-museum such as Robben Island in South Africa or Indian Cellular Jail in India; museums like the Panoptico in Bogota which is currently the National Museum of Columbia; universities, like Saint-Paul et Saint-Jean in Lyon; luxury hotels…); other prisons are still operated.
Several years after using Piranese’s (Dolci Carceri) imaginary prisons in her works, Laure Tixier looks back on their architecture.
One day, while finding her way in the 14th arrondissement of Paris, she discovered on Google Earth a blurred area  corresponding to the prison de la Santé.  She wanted to give  shape to this black hole in the middle of the city. This attempt to repair the urban fabric is embodied via a transitional sculpture set on the floor of the gallery. The technique used for this « neighbourhood rug » is a mix of patchwork and palimpsest. The historical thread is woven from the geographical research. The geometry of confinement has a long story : it was brought from Russia by Jeremy Bentham, germinated in London, flourished in America and brought into France by Alexis de Tocqueville. European countries established and multiplied prisons in their colonies  – Asia and Africa –  where they did not exist. Today, they are overpopulated.
On the wall, a carpet represents  a neighbourhood of Ho Chi Minh Ville, with, in the centre, the prison Chi Boa built by the French during the colonial era and still in use today.
A bed sheet, symbol of intimacy, occasionally a jailbreak tool, is embroidered with the title of the exhibition and the plan of the State prison Pelican Bay in California.  This jail is a Supermax installation in which the prisoner is totally isolated, including from the rest of the prison.